Valescure

Dominant la ville, sur les contreforts de l’Estérel, à l’origine ce quartier n’est qu’une forêt de pins et de chênes au sous-bois odorant et balsamique. Pour y accéder de la gare on parcourt 3 kms d’une route en terre au milieu d’une plaine faite de vignes, jardins et pâturages. Quelques fermes et maisons isolées sans caractère retiennent notre regard avant d’arriver à la croisée de trois chemins.

On est en 1881 et Félix Martin veut poursuivre une extension de la ville dans ce bel environnement. Associé au chirurgien parisien, Léon Labbé, et à quelques autres, il va acquérir d’immenses terrains. Ils sont les premiers à voir en Valescure une opportunité.
L’époque est aux sanatoriums, maisons de repos et de convalescence, pour traiter les suites des maladies pulmonaires et la tuberculose. Un climat doux, un environnement de pins et de maquis odorant, sur une colline dominant la mer confortent l’idée pour de nombreux médecins, investisseurs convaincus, de créer un lieu de thermalisme, une station climatique. L’hygiénisme est à la mode.

L’arrivée à Valescure

Le Grand Hotel

En 1882 l’architecte Pierre Aublé construit un pensionnat pour jeunes filles à la santé déficiente, tenu par des religieuses, puis devenant Hôtel Thermal… Des médecins parisiens arrivent et construisent de belles villas : Léon Labbé – villa Marguerite, Noël Gueneau de Mussy – villas Mon Repos et Les Pins, son cousin Henri Gueneau de Mussy – villa Clythia, Auguste Lutaud – chalet des Mimosas , Léon Petit – villa les Cigales et Alexandre Chargé, l’homéopathe spécialisé dans les maladies des voies respiratoires – villa Saint- Dominique.
Les grands projets autour du thermalisme vont assez vite être abandonnés, mais ils ont conforté l’idée d’un climat doux et salutaire à Valescure, créant l’opportunité d’une saison hivernale qui connait un franc succès.

Des artistes entrainés par le directeur de l’opéra-comique, Léon Carvalho, vont investir : lui-même dans la villa Magali, Suzanne Reichenberg de la comédie française dans la villa Marie …. Carvalho fait venir aussi Angelo Mariani, pharmacien célèbre dans le monde entier par son vin tonique à la coca, mais aussi mécène du Tout-Paris artistique et littéraire. Il invite généreusement de nombreuses personnalités dans sa belle villa Andréa, en particulier son ami Oscar Roty, sculpteur médailler, créateur de la semeuse, qui achète la villa Marie.
On se reçoit comme dans les salons parisiens, le quartier est animé. On invite à séjourner ou on loue.
La création de l’Hôtel Coirier puis la transformation du pensionnat en Hôtel des Anglais attirent une nouvelle clientèle aisée, en particulier d’origine britannique.

La Villa Andréa

La Villa Le Maquis

En 1885, le premier Anglais à choisir Valescure pour y vivre sera Sydney Bentall qui construit les Asphodèles. En 1889 s’installe Sir William Bullock Hall venu ici avec sa femme Berthe Goulden, suite à l’ intérêt archéologique qu’il a eu pour la voie romaine; ils achètent Le Maquis. Les frères de Berthe choisissent de se retrouver à Valescure. Le Pasteur Goulden marié à l’héritière du champagne Heidsieck construit la Chêneraie. Ernest achète la Lézardière et son fils Paul marié à sa cousine, Sibylle Bullock Hall, les Cigales.
En 1892 un hôte de marque choisit de séjourner à Valescure, il s’agit du premier ministre anglais Sir William Edward Gladstone invité par son ami Stuart Rendel dans la villa Magali louée pour la saison d’hiver. Ils renouvelleront souvent ces séjours d’hiver, parfois avec des ministres.

Lord Rendel, député libéral fortuné, va acquérir de nombreux terrains, avec quelques associés compatriotes. Il propose la construction d’une église anglicane, « la chapelle de Tous les Saints ». Il joue un rôle essentiel dans la création du golf, qui sera inauguré en 1900 en présence du grand-duc Michel de Russie, frère du Tsar.

Boulevard des Mimosas

Les golfeurs

Plusieurs Lords ou grandes fortunes anglaises vont acheter de grands terrains pour y construire encore de belles villas. Lord Ashcombe, Nelson Hector, le colonel Call, le colonel Brooke, Edward Winton, Lord Amherst, richissime, proche de la famille royale et député conservateur.
Le quartier de Valescure est devenu anglais, On se retrouve pour des parties de campagne, de tennis puis de golf…

La villégiature d’hiver à St Raphaël s’arrête pendant la guerre de 14 puis reprend jusque dans les années 30, après la grande crise économique, relayée ensuite par la saison d’été préférée par la grande bourgeoisie.

L’histoire de Valescure s’est ainsi forgée autour d’architectes talentueux, de médecins de renom défenseurs de l’hygiénisme, d’artistes de premier plan, et d’une colonie anglaise de l’ère victorienne, qui aura laissé une empreinte durable.